La Partition, Diane Brasseur, Allary Editions.

 » Koula regarde sa vie comme un promeneur sans boussole. « C’est ma vie, c’est bien ma vie ».A cause de Paul Peter K, de son frère, de sa mère, de l’amour, de la maladie, de la Suisse et même de son fils Bruno K, elle a oublié ses rêves comme on oublie un parapluie, distraitement sous la banquette d’un train ou d’une salle d’attente. » 

« S’il fallait transcrire les battements de son cœur sur une partition, alors le tempo serait allegro avec des accélérations animato, et la nuance fortissimo. » 

J’ai eu la surprise de recevoir dans ma boîte aux lettres La Partition de Diane Brasseur. Je remercie d’ailleurs d’ores et déjà Version Femina pour ce second envoi. Le titre et le résumé m’interpellaient, moi qui suis musicienne. Je l’ouvrais donc, avide de découverte, lisant avec délectation les premiers mots… Chacun porte en soi une mélodie. J’étais déjà transportée avec ces simples mots, et cela continuait à mesure que mes yeux parcouraient, allegro, les lignes – non pas d’une partition, mais bien de ce roman… Le style de l’autrice est beau, pur, et pourtant cinglant par moment.  Le résumé va être compliqué à faire, comme il serait impossible de résumer une œuvre musicale… Les mouvements s’éclairent les uns les autres, et je ne veux pas vous gâcher l’harmonie de la découverte…

Bruno K s’apprête à retrouver sa fratrie. Alexakis, son petit frère, revient donner un concert. Il est un violoniste reconnu, grâce à son frère Bruno K qui s’est lui-même construit dans la musique. Elle a été sa bouée de sauvetage, sa compagne dans la solitude. Cette rencontre tant attendue n’arrivera jamais. Le destin en a choisi autrement : Bruno K s’effondre en pleine ville. Arrêt cardiaque. L’occasion pour le lecteur de croiser les vies des personnages principaux du roman dans ce moment précis de la terrible annonce, rythmées par ce deuil. Une cadence… imparfaite, en quelque sorte. Comme un flash-back, le lecteur découvre l’enfance difficile de Bruno K, de sa mère – mariée trop jeune – de la douleur, de l’amour. Enfin, comme un retour au thème dans un concerto, le lecteur assiste au concert d’Alexakis…

Ce roman porte bien son titre. Il est une véritable partition. Une partition de la vie, où se mêlent le mode majeur, avec ses événements grandiloquents, et le mineur, celui de la douleur, de la nostalgie du temps qui passe. Quelques modulations par moment, chassant les nuages sombres pour laisser place à un ciel plus bleu. Et bien sûr, des silences qui annoncent des moments de réflexion, des non-dits. L’amour d’une mère et d’un fils, qui se passe de toute fioriture. Par ici, quelques trémolos, par là, un rythme martial laissant résonner des graves comme un glas dans la nuit. Le lecteur reste le chef d’orchestre : à lui de tisser les liens, à lui de s’approprier la partition pour n’en retenir que la mélodie qui lui correspond, et d’écrire alors la partition de sa propre vie.

Ghost in love, Marc Lévy, Robert Laffont | Versilio

« Il a fallu que je disparaisse pour que tu commences à chercher par toi-même, à fouiller le trésor de nos moments vécus, de nos conversations, à rassembler ces souvenirs endormis, comme tu rangeais tes  cahiers dans ton cartable, à vouloir enfin nous connaître. Est-ce cet étrange jeu de la vie qui me fait renaître aujourd’hui, pour nous relier enfin ? Maintenant que, bien plus que mon fils, tu es devenu un homme. » 

« Un jour, tu feras ce voyage avec ton fils ou ta fille, et tu pédaleras en jetant tout le temps des regards en arrière. Tu vois, peut-être que c’est aussi simple que cela d’être un père, ouvrir la route et se retourner sans cesse. » 

Cela faisait longtemps que j’attendais qu’un nouveau roman de Marc Levy sorte. J’avais adoré, du haut de mes neuf ans – ciel que le temps passe vite – son premier roman, Et si c’était vrai… Mes romans préférés de Marc Lévy restent ses premiers titres… Où es-tu, et Toutes ces choses qu’on ne s’est pas dites. Ce mercredi 15 mai, je me précipitais dans ma librairie afin de m’emparer de ce dernier roman, qui, rien qu’en lisant le titre, annonçait une aventure des plus inattendue…

Thomas, pianiste professionnel qui joue aux quatre coins du monde, tente de décompresser en fumant une cigarette, laissée par la meilleure amie de sa mère, dans le bureau de feu son  père. Hélas, ce soi-disant déstressant aux allures de cigarette n’en n’est pas un : il s’agit d’un joint. Thomas voit alors apparaître son père, disparu depuis cinq ans, dans le fauteuil qu’il avait l’habitude d’occuper de son vivant… Apparition ? Rêve ? Cauchemar ? Et si son père était bel et bien revenu pour lui demander un ultime service ?

On retrouve incontestablement dans ce roman, les premiers pas de Marc Lévy, avec une histoire singulière flirtant entre le monde des vivants et celui des disparus… qui ne le sont pas tout à fait. Un roman qu’on ne peut qu’adorer dès les premières lignes. En plus de cette histoire rocambolesque, mais pour autant poignante, on découvre des personnages gorgés d’humour ! On lit, on tourne les pages, et on rit, beaucoup, on s’émeut. Et alors que le compte à rebours est lancé pour Thomas, le nôtre, à chaque page, nous rapproche d’une séparation qu’on veut le plus tard possible : celle aux côtés de Thomas, son père et Manon.

Cupidon a des ailes en carton, Raphaëlle Giordano, Editions Eyrollles, Plon

« Je souris dans mon délire. J’imagine mon personnage, tiens, pourquoi pas une Mamzelle Juju, Juliette des temps modernes, fraîchement larguée par son Roméo, et qui se serait autoproclamée Exploratrice de l’Amour, prête à essuyer toutes les tempêtes pour mieux en comprendre les rouages, et qui raconterait ses péripéties aux spectateurs au fur et à mesure de ses découvertes… »

« Vous voyez, Meredith, la vie des gens serait tellement plus épanouie s’ils apprenaient à cueillir les moments d’amour avec autant de simplicité qu’un rayon de soleil quand il se présente. Un rayon de soleil, vous le prenez, sans vous poser de questions, comme il vient. »

Je regardais ce livre depuis sa sortie, me disant qu’un jour ou l’autre, j’allais craquer. C’est fin de semaine dernière que c’est arrivé : un exemplaire était négligemment posé entre deux autres ouvrages. J’avais lu le premier livre de cette autrice, Ta deuxième vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une, que j’avais apprécié il y a maintenant de cela presque quatre ans. Je trouvais intéressant de lire à nouveau cette autrice et ses considérations bien-être avec quelques années de plus.

Meredith est comédienne. Elle n’arrive pas à percer, et se résout à jouer avec Rose, sa meilleure amie, sur des petites scènes de province. Antoine, son compagnon du moment, lui, est un acteur principal pour une des plus grosses radios de France. Tous deux filent le parfait amour. Pourtant, Meredith n’imagine pas le grand amour de cette façon : elle veut être prête pour savourer cette vie partagée avec sa moitié, Antoine. Alors qu’il s’apprête à s’engager un peu plus dans leur relation en lui donnant le double de ses clés, Meredith lui annonce qu’elle doit partir pour se retrouver et se préparer à cette belle histoire qui les attend. Elle entame alors son Love Tour, en prenant des notes dans son Love Organizer, histoire d’en savoir un peu plus sur son Amourability. Mais, alors que Meredith fait son parcours initiatique de l’amour, Antoine sera-t-il encore prêt pour le grand amour ? Sera-t-il là à son retour ?

La richesse de Cupidon a les ailes en carton est qu’il n’est pas écrit à la voix seule de Meredith. Une même situation est exploitée plusieurs fois. Ainsi, les quiproquos et incompréhensions conjugaux du quotidien sont livrés d’une part, par Meredith, et d’autre part par Antoine. Les situations cocasses sont alors démystifiées, montrant au lecteur que parfois, son simple ressenti des choses ne suffit pas. Raphaëlle Giordano réussit à rappeler que dans toute situation, notre simple subjectivité ne peut suffire à fonder une théorie – tous domaines confondus. Les clichés de la vie amoureuse sont remis en question tour à tour, laissant le soin de la réflexion au lecteur…

La Kippa bleue, David Allouche, Editions Eyrolles

 » Moi, c’est le monde intérieur qui fait mon malheur. Le monde extérieur, c’est mon salut. »

 » Tu racontes les histoires comme un Marseillais, toi ! Je te pose des questions simples, tu fais des réponses longues et tu pars dans des délires. Moi, je crois qu’on fait partie d’un tout, qu’on est la pièce d’un puzzle et que nos contours sont dessinés par les pièces voisines. Même l’être le plus rebelle est façonné par les autres. Alors, elles sont comment les pièces de ton puzzle ? »

J’avais commandé ce roman avant de partir en Espagne, lui laissant le temps d’arriver pendant que moi-même j’étais ailleurs. J’ai connu – une fois de plus – l’auteur par le biais magique et intemporel des réseaux sociaux. C’est toujours mystérieux de découvrir un roman après avoir échangé avec son auteur… Je me laissais donc envoûter par le style et l’écriture, et tournais les pages sans voir passer le temps…

Sasha est un adolescent juif, bercé dans la religion. Mais voilà : il ne croit plus en Dieu. A l’approche des fêtes religieuses, il se met alors en tête d’annoncer à son père que la religion et lui, c’est fini. Ce qui l’intéresse du haut de ses dix-sept ans, c’est, d’une part, d’intégrer l’école d’art marseillaise qui lui a ouvert ses portes, et, d’autre part, les filles. Au détour d’un musée, il va rencontrer Carla – une jeune fille étudiante en philosophie, qui va l’aider dans sa construction du moi

Ce récit s’apparente à un essai, où romance et philosophie – ici au sens premier, amour de la sagesse, viennent sous forme de synthèse, ponctuer une dialectique parfaite. La religion, sujet épineux, est ici abordée de manière très simple et intelligente, laissant le lecteur rejoindre la partie du débat qu’il choisit. Et même si j’ai eu cette impression, égoïste, qu’il avait été écrit pour moi (les études en philosophie, le lycée Thiers et son cours Julien me renvoyant à ma vie étudiante marseillaise où j’étudiais la philosophie des mathématiques, la destination finale d’Antibes, lieu que je ne connais que trop bien pour y avoir vécu plus vingt ans, les références à Montaigne, un de mes philosophes préférés, que je consulte régulièrement, et à Brad Mehldau, compagnon fidèle lors de mes voyages en voiture, et enfin, le clin d’œil à une réplique de Cyrano…), c’est une certitude que vous vous retrouverez, vous aussi, dans ce texte… Et ce qui fait de ce roman une réussite, c’est… son panache !

Je ne cours plus qu’après mes rêves, Bruno Combes, Michel Lafon

« Parsemé d’embûches et de souffrances, qu’il est long le chemin pour arriver jusqu’à soi. Nous sommes tous persuadés que demain, dans quelques mois, un an tout au plus nous choisirons enfin de vivre ce que nous souhaitons réellement. Mais combien d’entre nous oseront se poser les bonnes questions, franchir le pas et décider d’être en accord avec leurs aspirations profondes ? »

« Depuis qu’elle avait sympathisé avec Louane, un fol espoir prenait forme dans son esprit: et si cette jeune femme avait été mise sur son chemin pour l’aider à réaliser son dernier rêve ? Comme si deux êtres ne se rencontraient pas par hasard, mais parce que quelque chose de plus fort qu’eux les avait inéluctablement amenés à se rencontrer: c’était peut-être cela qu’on appelait le destin. »

Lorsque ce livre est paru, j’étais en voyage scolaire, et plus précisément… en Espagne. Le lire à mon retour en France s’est imposé, moi qui venais de découvrir l’Espagne pour la toute première fois. En lisant ce livre, je ferai, en quelque sorte, à nouveau le voyage vers le soleil et la chaleur typique de ce pays méditerranéen. De plus, le titre m’avait charmée : courir après ses rêves… Vaste projet, que l’on prend trop à la légère… Le projet d’une vie, en somme…

Les 3L. Non, ce n’est pas le dernier groupe de musique à la mode, mais bien l’union de trois femmes : Louane, Laurene et Louise. Elles ne se connaissaient pas, vivaient chacune leur vie routinière, pavée de déceptions et d’espoirs. Louane, suite à l’échec de son baccalauréat, est punie par son père à travailler tout l’été dans une maison médicalisée pour des patients souffrant d’Alzheimer. Selon lui, elle va apprendre la vie… Il ne croit pas si bien dire. Louise, une grand-mère internée dans cette maison, demande à Louane un service qui va sceller leur destin… Sur le chemin se trouvera Laurene… L’avenir des trois femmes est alors lié…

Bruno Combes réussit à merveille à dépeindre les sentiments qui nous animent au cours d’une vie. Louane, Laurene et Louise ne sont finalement que des personnifications des divers moments clés de notre passage sur terre : l’adolescence et sa demande de liberté, la quarantaine et le bilan professionnel et personnel qu’elle entraîne, la vieillesse et sa réflexion sur le chemin parcouru. Regrets, espoirs ? Que peut-on attendre de la vie ? Doit-on d’ailleurs attendre ou devons-nous, au contraire, courir après nos rêves ?