L’habit ne fait pas le Moineau, Zoé Brisby, Mazarine éditions.

« Ce que je veux dire, c’est que tu n’es naturellement pas doué pour le bonheur. Certaines personnes naissent avec ce don et d’autres, moins chanceuses, doivent apprendre à développer la capacité à s’émerveiller, à profiter. Mais la bonne nouvelle, c’est que c’est possible, tu peux apprendre. Peut-être pas maintenant, car tu es trop enfermé dans ta dépression pour te rendre compte des belles choses, mais plus tard, quand du temps aura passé, que tes blessures auront un peu cicatrisé et que tu y verras plus clair. »

« Tu es mon oxymore. Deux mots contraires qui vont pourtant parfaitement ensemble. Tu as l’impression d’avoir tout perdu, et moi aussi. Pour toi, ça va passer, je te le promets, même si pour l’instant tu as du mal à le croire. Tandis que pour moi, tout est réellement terminé. Dans mon désespoir, j’ai l’espoir que tu m’amènes à Bruxelles pour accomplir le dernier de mes vœux. C’est contradictoire, je le sais, mais notre rencontre est peut-être un signe du destin. Tu es la dernière pitrerie de mon existence, ma dernière chance. Je sais que je te demande beaucoup… » 

J’ai suivi la sortie de ce roman au titre des plus étonnants. Un proverbe, visiblement transformé ! J’ai été intriguée par ce changement, et les quelques passages proposés tout au long de la sortie par l’autrice m’ont donné envie de lire le roman dans son intégralité. Une fois de plus, je me suis rendue dans ma librairie préférée. Il est resté quelques temps dans ma PAL : je ne voulais pas enchaîner des romans qui présentaient des personnages du même âge ou qui présentent certains traits de caractères communs. Je vous rassure, ce livre est bien singulier, original, et ne ressemble à aucun autre !

Un site de covoiturage, deux annonces : l’un cherche un passager, l’autre un conducteur. Tous deux veulent se rendre à Bruxelles. Les portraits décrits des intéressés ne sont pas séduisants, mais, puisqu’ils ne sont que tous les deux à se rendre dans cette destination commune… Après une rencontre des plus incongrues, Maxine, une vieille dame pleine de vie et Alex, un jeune homme éteint, sous l’emprise d’une dépression, à bord de la Twingo de Max, roulent vers leur destin. Très vite, les deux personnes antithétiques apprennent à se connaître et se lient d’amitié… Que leur réserve ce voyage ?

Ce roman est non seulement un roman d’aventure, mais aussi un roman d’initiation au bonheur. Maxine devrait être notre modèle à tous : malgré son grand âge, elle croque la vie à pleines dents, vit le moment présent. Je me suis reconnue en elle à certains moments, cet optimisme débordant et cet enthousiasme qu’on m’attribue régulièrement… L’autrice place dans la voix de Maxine une véritable philosophie de vie. Pour Alex, Maxine devient son maître à penser. En parallèle, une réflexion sur les médias est menée : Maxine aurait été enlevée par un jeune dépressif aux envies de vengeance… La police est alors à leurs trousses, faisant de ces deux personnages des fugitifs. Un livre de chevet pour ceux qui, comme Alex, ne sont pas naturellement doués pour le bonheur… La fin vous réserve de jolies surprises…

Les gratitudes, Delphine de Vigan, JC Lattès.

« Je suis orthophoniste. Je travaille avec les mots et avec le silence. Les non-dits. Je travaille avec la honte, le secret, les regrets. Je travaille avec l’absence, les souvenirs disparus, et ceux qui ressurgissent, au détour d’un prénom, d’une image, d’un parfum. Je travaille avec les douleurs d’hier et celles d’aujourd’hui. Les confidences. Et la peur de mourir. Cela fait partie de mon métier. »

« Vieillir, c’est apprendre à perdre. Encaisser, chaque semaine ou presque, un nouveau déficit, une nouvelle altération, un nouveau dommage. Voilà ce que je vois. Et plus rien ne figure dans la colonne des profits. Un jour, ne plus pouvoir courir, marcher, se pencher, se baisser, soulever, tendre, plier, se tourner, de ce côté, puis de l’autre, ni en avant, ni en arrière, plus le matin, plus le soir, plus du tout. S’accommoder sans cesse. Perdre la mémoire, perdre ses repères, perdre ses mots. Perdre l’équilibre, la vue, la notion du temps, perdre le sommeil, perdre l’ouïe, perdre la boule. »

En ce samedi 15 juin, mon dévolu s’est jeté sur Les gratitudes de Delphine de Vigan. J’en avais entendu parler à sa sortie, sans y prêter plus attention que cela. Hier, je l’ai donc enfin pris en main pour en lire le résumé. Ce dernier, mystérieux, m’a intriguée. Je le prenais et le commençai donc, hier soir, installée confortablement… Je ne l’ai reposé qu’en fin de soirée, une fois terminé…

Michka est une vieille dame (ne dites pas une personne âgée, cela l’agace… Vous dites bien les jeunes, et non les personnes jeunes ?!). Elle a des problèmes d’aphasie, et une peur : celle de tout perdre. Elle cherche sans cesse… jusqu’au jour où elle ne peut plus rester seule dans son appartement. Marie, sa fille adoptive, l’épaule comme elle peut. Michka est admise dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Entre les visites de Marie, et celles de Jérôme, son orthophoniste, Michka, tout en vieillissant trop vite, va réaliser son rêve : dire merci à ceux qui l’ont recueillie lorsqu’elle n’était qu’une enfant…

Un roman bouleversant. L’écriture de Delphine de Vigan est fluide et poignante. Les mots – si importants pour Michka qui ne les trouve plus – s’emparent littéralement de vous. J’ai eu beaucoup de mal à ne choisir que deux passages dans tout ce roman, tant la beauté de l’écriture traverse ces pages. Au-delà d’une histoire touchante, simple, Delphine de Vigan nous rappelle que la vieillesse est inhérente à la vie, qu’elle fait partie de nous, que nous sommes – si nous voulons reprendre Aristote – des vieux en puissance, avant de le devenir en acte. Le temps passe. Vite. Peut-être trop. C’est pourquoi, il ne faut pas attendre pour dire les choses, au risque qu’il soit un jour trop tard… «C’est vrai, c’est pénible à la fin. On croit toujours qu’on a le temps de dire les choses, et puis soudain c’est trop tard. On croit qu’il suffit de montrer, de gesticuler, mais ce n’est pas vrai, il faut dire.»

Les Promesses de nos Lendemains, Tiphaine Hadet, City Editions.

 » Je retourne sur le message de Stéphane. Les commentaires des membres commencent à affluer, alors qu’il n’est en ligne que depuis quelques minutes. Je me pose la question de savoir comment font tous ces gens pour être à la fois avec leur famille, en train de regarder un film ou de dîner, et rédiger des commentaires aussi rapidement. Les gens doivent tout faire avec leur ordinateur, y compris manger, boire et aller aux toilettes. Ça me parait inconcevable. »

« Nous flânons comme deux touristes. Je défie quiconque à cet instant de deviner ce que nous traînons dans nos mollets. Un divorce, trois enfants, une leucémie, un changement de pays, un renouement forcé avec une famille coincée, un concours d’écriture, des amis virtuels, Julien Doré et certainement une bonne dose de cellulite pour ma part, chose dont Claire a toujours été dépourvue. »

J’attendais ce jour avec impatience ! La sortie du nouveau roman de Tiphaine Hadet. Depuis la lecture de son premier roman, Le Bonheur arrive toujours sur la pointe des pieds, je suis les nouvelles de l’autrice sur les réseaux sociaux. Je remercie l’autrice ainsi que sa maison d’édition, City Editions, de m’avoir permis de faire partie du panel des chroniqueurs et blogueurs à avoir lu le roman avant sa sortie. Quel plaisir de le lire en avant-première ! J’ai ouvert l’enveloppe avec délicatesse, comme une enfant devant un cadeau de Noël. Que j’ai savouré cet instant ! Le côté rétro de la couverture, des couleurs pastelles nous ramènent à une autre époque : j’adore ! Je n’ai qu’une hâte : découvrir ses personnages et l’histoire qu’ils ont à nous livrer…

Valentine est mariée à Franck. Ensemble, ils élèvent leurs trois enfants. Pourtant, Valentine vit avec une épée de Damoclès : Franck l’avait prévenue, il la quittera le jour de ses trente-sept ans. Ce jour arrivé, voilà Franck prenant le large pour un autre continent, laissant Valentine seule avec ses trois enfants. Ils vont devoir apprendre à vivre différemment. La maman célibataire est épaulée par Léa, une amie virtuelle du groupe de lecture qu’elles suivent toutes les deux. Un concours : écrire les paroles d’une chanson pour Julien Doré. Le défi est lancé : « Si tu le fais, je le fais ».

Comme j’ai déjà pu le suggérer sur ce blog, l’écriture de Tiphaine Hadet est comme un bonbon, qui, en fondant, révèle différentes saveurs. Dès les premières pages, on entre dans l’intimité de cette famille qui n’en est plus une pour longtemps. Livre feel good, assurément, avec des pointes de réflexion sur la façon dont nous choisissons de vivre notre passage sur terre. Bien-sûr, l’omniprésence de Julien Doré dans ce roman n’a pu que me plaire, moi qui suis une véritable fan de ce chanteur, de ses chansons et de son style. La soirée organisée à la fin du roman m’a replongée dans mes propres souvenirs… J’ai participé à un concours (il fallait proposer deux questions à lui poser) et j’ai été choisie – aux côtés de six autres journalistes d’un jour – pour lui poser, donc, mes deux questions, dans sa suite, à l’Hotel Majestic sur la Croisette…

Vous ne pouvez que lire ce roman en suivant les titres des chapitres pour créer votre playlist… Si le début du roman pourrait être accompagné par Mon Apache, vous pouvez faire quelques pas de danse sur Soirées Parisiennes à la fin de ce roman. Un joli pied de nez à la vie ! 

Les Démons de Santa Ana, Jack Présage, Jack Présage Editions.

« Mon nom est Tonio. Je réside chez ma mère à quelques pas d’ici, dans le quartier résidentiel. Mon père l’a quittée. Il s’est installé dans la capitale, où il m’a inscrit contre mon gré à l’école française. En semaine je suis en pension à San Salvador. Quand les cours sont finis, je reviens chez ma mère avec mon frère, qui passe ses journées à peindre. Mes amis et moi avons créé une association. Nous l’avons baptisée ‘Les démons de Santa Ana’, parce que nous hantons les rues de notre ville afin d’en connaître tous les recoins, tous ses habitants aussi, pour ne plus avoir peur de sortir de nos maisons, pour nous sentir chez nous. »

« L’intervention dans le Palais assiégé a été coordonné par les Démons de Santa Ana, une organisation de défense des libertés individuelles menée par mon ami Miguel Fortenzia. Des raisons de santé l’ont empêché d’être présent aujourd’hui. Cette action spectaculaire qu’il a menée à bien n’aurait pu se dérouler sans le soulèvement massif de la population, à San Salvador comme dans tout le pays. Je dédie cette médaille au peuple tout entier. » 

J’ai découvert l’autrice, Jack Présage, lors d’une rencontre dédicace organisée par ma librairie, le week-end dernier. Curieuse, je partais donc à la rencontre de cette écrivaine et de ses personnages. Nous avons échangé un long moment autour de ses livres : le dernier de la trilogie – Les Démons de Santa Ana – est sorti récemment, en mars. Ce dernier est précédé de deux tomes, mais, rassurez-vous, ils peuvent se lire indépendamment les uns des autres. Sur les recommandations de l’autrice, je commencerai donc par celui-là. Notre discussion a ensuite dévié vers l’écriture de façon plus générale. Je trouve cela toujours très plaisant de connaître les méthodes d’écriture des auteurs, avant de lire leur œuvre. Nous avons également parlé de la musique, et du rapport de nos nouvelles générations avec la lecture. J’ai passé un très bon moment avec l’autrice ! Une belle rencontre, que je souhaitais alors prolonger en commençant son livre dès l’après-midi… Vous avez maintenant l’habitude, je choisis, sur certains romans qui à mon sens ne doivent pas être abordés avec des idées déjà fixées, de ne livrer qu’un bref résumé, ceci pour vous laisser la plus grande part de surprise à la lecture. Ce roman en fait partie, et, afin de vous laisser un entier suspense, je nous vous proposerai donc que quelques lignes de résumé…

Le roman s’ouvre sur l’enfance des personnages et la constitution de ce groupe, les Démons de Santa Ana, et plus particulièrement sur Tonio, personnage phare de l’histoire. Après une remise de médailles, la course effrénée du groupe d’adolescents se poursuit. Prises de risques, inquiétude, premiers émois, les adolescents ne sont pas au bout de leur surprise…

L’histoire de ce roman d’aventure est renversante. L’autrice nous fait voyager. Le lecteur est lui aussi un personnage de cette course effrénée, ressentant chaque doute, s’inquiétant pour les personnages, s’interrogeant sur les sentiments des uns et des autres. Le style de l’autrice est soutenu, et le vocabulaire très riche. J’ai été très sensible à cet amour pour les beaux mots, placés au bon endroit, au bon moment. Mais la prouesse que réussit Jack Présage est cette invitation au voyage. Pas besoin d’un billet aller-retour pour vous rendre au Salvador, installez-vous confortablement dans votre canapé, délestez-vous de tout repère temporal, et embarquez à bord du livre les Démons de Santa Ana. Dépaysement assuré !

J’ai dû rêver trop fort, Michel Bussi, Presses de la Cité.

« J’essaie d’être le plus lucide possible. Je ne crois plus au hasard ! Fini ! Je me contente de constater les faits, et celui-ci est clair, même s’il relève de la sorcellerie : j’attendais un signe du passé et il m’est apparu. Quelqu’un me l’a servi. Quelqu’un qui sait ce qu’il signifie. Charlotte ? Un serveur machiavélique ? Un Dieu capable de lire dans mon cerveau ? Aucune hypothèse n’a de sens… »

 « Et toi, Maman ? Il y a quelqu’un que tu as aimé si fort que tu ne veux pas l’oublier ? Tellement fort que toute ta vie, tu croiseras des choses qui te feront penser à lui ? »

Malgré son omniprésence dans les rayons depuis plusieurs années, je ne m’étais jamais attardée sur un roman de Michel Bussi. Je ne sais pas pourquoi. Il y a parfois quelques auteurs que nous ne connaissons pas, et pourtant, rien ne nous attire… Puis est sorti ce roman, j’ai dû rêver trop fort. Un titre aussi vertigineux que la chanson dont il est tiré, le Vertige de l’Amour. L’hirondelle de la couverture semblait m’inviter à m’envoler avec elle, la suivant inexorablement au fil des pages. Encore une fois, afin de ne pas vous gâcher la surprise de la lecture, je vais résumer le livre de façon très globale… 

Nathalie est une quinquagénaire, heureuse entourée de sa petite famille, son mari Olivier et ses deux filles, Laura et Margot. Ce n’est pourtant pas évident tous les jours avec son métier d’hôtesse de l’air. Toujours par monts et par vaux. La vie est un éternel recommencement. 1999-2019… Nathalie va revivre un passé qu’elle garde au fond d’elle comme un trésor. Simples coïncidences ? Hasard ? Destin ? Simples coïncidences ?

Dès les premières pages, le lecteur s’attache au personnage de Nathalie, le personnage principal du roman. L’histoire est ancrée, frénétique, on tourne les pages en se demandant ce qui nous attend à la suivante… On imagine la plus folle des histoires, on la transforme au fur et à mesure des indices disséminés ici ou là… Et on s’interroge. Non seulement sur la vie de Nathalie, mais sur notre propre vécu. Sur les coïncidences que nous voyons parfois partout, peut-être à tort : signe du destin ou simple hasard ? « Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous ». Si la phrase de Paul Eluard est citée par un des personnages du livre, je pense que j’avais rendez-vous avec Michel Bussi en ce mois de mai 2019. Et vous ?