Christelle Saïani, Lumière, Librinova.

« Olivier se fond au canapé, ferme les paupières et tend lentement sur son visage un sourire aussi fin qu’un fil de funambule. Quelles idées balancent sur ce fil ? Olivier progresse en ce moment sur un câble vertigineux, dans un espace tendu exempt de toute légèreté. Franchis avec grâce et équilibre la ligne ultime, le regard ciblé sur le point de mire, en dépit de la peur et de la solitude. Ne plus reculer et, jusqu’au dernier pas, prendre le temps malgré tout de parenthèses immobiles où se sentir vivre. Avoir encore le souci du bonheur au moment où l’univers se rétrécit. »

« Alexandre appartient définitivement à une autre planète, la même que celle d’Olivier. Celle où le soleil brille en même temps que la pluie et déploie le spectre continu de la lumière. Celle où les flaques sont faites pour sauter dedans à pîeds joints et où une chanson aussi gaie que « three little birds » peut faire danser la mort. »

En un peu plus d’un an, grâce à ce blog, j’ai eu la chance de rencontrer des auteurs et autrices de divers horizons. Il y a quelque temps, je recevais un message touchant sur Babelio, d’une autrice qui me proposait alors de lire son livre. Vous le savez maintenant bien, il me plaît de découvrir des romans dont je ne soupçonne pas l’existence. Je profite de ce passage pour m’excuser auprès des auteurs qui m’ont envoyé leur livre au format numérique : il est vrai que je privilégie toujours le format papier, et vos écrits peuvent alors rester un peu plus longuement dans ma PAL.

Cette autrice, c’est Christelle Saïani. Après quelques échanges épistolaires (nous avons ce point commun de regretter le temps des lettres, où les mots étaient encore choisis avant d’être posés sur un papier), je reçois ce roman Lumière. J’avais hâte de découvrir cet écrit. Les échanges que nous avions eu étaient riches et ô combien soigneusement écrits. Quelle surprise de recevoir le paquet venant du sud de la France, près d’Aix-en-Provence où j’ai fait mes études !

Ambre est amoureuse de Léo. Alors qu’elle l’attend pour partir en week-end, ce dernier lui annonce que leur histoire touche à sa fin, sans aucune explication. Ambre, dans l’incompréhension la plus totale, est dévastée. En plus, elle ne supporte plus Olivier, son voisin qui frime avec son crâne rasé et qui passe son temps à recevoir des amis pour faire la fête. Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’Olivier est atteint d’un cancer. Après une rencontre des plus froides, Ambre s’excuse auprès de ce voisin qui, finalement, n’est pas comme elle le pensait. Elle entre ainsi dans la famille d’Olivier pour découvrir un véritable rayon de soleil, malgré la maladie. Comment Ambre et Olivier vont-ils apprendre à faire face à cette vie, si triste et joyeuse à la fois ?

Ce roman est poignant. Des émotions en pagaille se dégagent au fil des pages. Un thème dur, qui peut nous mettre mal à l’aise à certains moments: qui n’a jamais jugé trop hâtivement un voisin ? Sous les masques colorés se trouvent parfois une irrépressible douleur. Au delà d’un récit de vie, et d’un rappel quant à nos petits bonheurs du quotidien qu’il faut savoir apprécier, ce roman est un arc-en-ciel littéraire. Chaque mot est soigneusement choisi, et posé avec délicatesse sur le papier. Un roman qui nous plonge dans la pleine conscience.

Agnès Martin-Lugand, Nos résiliences, Michel Lafon.

« Cette personne se serait dit que tout le monde était heureux, que tout allait bien dans cette jolie famille et serait repartie sans gratter la surface de la belle image. Mais s’il était resté, et qu’il avait pris le temps de mieux observer, il aurait vu tout autre chose. Il aurait fini par s’interroger sur le regard du papa bien souvent – trop souvent – dans le vague, il aurait même eu l’impression que cet homme ne se sentait pas à sa place. »

« Lui et toi vous aurez beau faire tout ce que vous pourrez, on ne peut pas changer l’histoire, vous n’étiez pas avec nous. C’est peut-être terrible pour vous, mais.. nous étions au même endroit elle et moi, nous étions ensemble, ce soir-là. C’est son regard à elle que j’ai croisé quand j’ai repris conscience après l’impact et c’est pareil de son côté. On a souffert en même temps. Elle a vu mes blessures, je l’ai vue sombrer… »

C’est une sortie que j’attendais. Depuis que j’ai découvert en poche, il y a bien des années maintenant, Les gens heureux lisent et boivent du café, je ne loupe plus aucune sortie de cette autrice ! J’avais quand même une appréhension, celle de ne pas autant accrocher que d’habitude, dans ce contexte particulier que nous connaissons tous actuellement. Mais, je vous rassure, pour les adeptes d’Agnès Martin-Lugand, vous retrouverez le même plaisir à lire celui-ci que ses précédents romans…

Ava tient une galerie de peinture. C’est un héritage familial. Son mari, Xavier, est vétérinaire. Tous deux coulent le parfait amour, avec leur deux enfants. Il est coutume que Xavier parte un mois tous les ans pour son travail. A son retour, la ré-adaptation à la vie de famille met toujours un certain temps. Alors qu’Ava organise un grand vernissage, Xavier refuse de venir, préférant se rendre à la clinique vétérinaire… La fête sera interrompue par un coup de fil de l’hôpital, Xavier a eu un accident… Comment Ava va-t-elle vivre ce chamboulement ?

Un roman un peu plus sombre que les autres, mais, peut-être, est-ce notre regard qui a changé vis-à-vis de notre rapport à l’hôpital ? On retrouve des personnages avec une forte personnalité, et on suit avec attention leurs aventures. Les mots d’Agnès Martin-Lugand, comme à son habitude, reflètent des sentiments humains universels. Ce titre, et cette histoire, sont dans l’ère du temps: on ne sait pas si tout pourra redevenir, malgré tous nos efforts, comme avant…